TEXTE

 

PLUS DE 1 MILLION DE TONNES EN STOCK

 

Quest-ce que luranium appauvri ?

   

 

Note extraite de l’étude menée juillet 1994-février 1995 avec Naïma Lefkir-Laffitte,

parue dans  Le Monde diplomatique, avril 1995

  

 

L’uranium appauvri est un sous-produit de la technique de l’enrichissement de l’uranium utilisée pour alimenter les réacteurs des centrales nucléaires. En effet, la principale composante du minerai pour la fission est l’isotope U 235, mais il ne représente que 0,7 % de la masse totale, le reste étant essentiellement composé de l’isotope U 238. L’enrichissement consiste donc à éliminer ce dernier. Les stocks d’uranium appauvri dans le monde dépassent 1 million de tonnes et s’accroissent au rythme de 50.000 tonnes par an.

L’uranium appauvri possède une forte densité, supérieure à celle du plomb et proche de celle de l’or. Si l’on ajoute à ces qualités une forte résistance et un coût de fabrication extrêmement bas, les projectiles en uranium appauvri mélangé à une faible quantité de titane présentent une faible résistance à l’air qui permet d’atteindre une vitesse de l’ordre de cinq fois celle du son et d’obtenir une portée supérieure de 1.000 mètres aux armes conventionnelles, un excellent pouvoir de pénétration des plaques d’acier épaisses et de bonnes qualités incendiaires : porté à haute température par l’impact, il prend immédiatement feu.

« La radioactivité de l’uranium appauvri étant de 1 curie par tonne, nous pensions jusqu’ici qu’il n’y avait pas de quoi fouetter un chat, confie le physicien Raymond Sené[1]. L’élément le plus grave pouvait paraître la toxicité chimique, qui ressemble à celle de tous les métaux lourds. Cependant, le fait qu’il y ait aérosolisation de l’UA pose problème, car il y a possibilité de transmission dans l’organisme. Et n’oublions pas que la période de l’uranium 238 est très longue, 4,5 milliards d’années... »

« Ce qui est notable quand on évoque les risques pour la santé liés à l’UA, confirme le biologiste Abraham Behar, c’est que ce matériau est inflammable et produit une fumée constituée d’un aérosol de particules, celui-ci pouvant entraîner un dépôt dans les alvéoles pulmonaires et, malgré une faible radioactivité, occasionner des dommages cellulaires par radiation alpha. Voilà qui apporte un élément nouveau par rapport à tout ce qui a été publié jusqu’ici. Cela peut expliquer le risque... »[2]

Selon un rapport publié par le Los Alamos National Laboratory, « le pourcentage d’uranium U 238 dispersé dans le nuage de détonation s’élève à près de 10 % ». Mais la proportion peut augmenter considérablement si on tient compte de l’impact. C’est ainsi que le colonel John M. Taylor, de l’Aberdeen Proving Ground, affirme : « Lors d’un fort impact, c’est bien 60 % de l’uranium appauvri qui peuvent être aérosolisés ». Il semble que les particules de cet aérosol soient en général inférieures à 5 microns[3]. C’est dire si elles peuvent aisément pénétrer dans l’organisme...


 

NOTES

[1] Entretien réalisé le 25 janvier 1995 avec M. Raymond Sené, chercheur en physique corpusculaire au CNRS, animateur du Groupement des scientifiques pour l’information sur le nucléaire, lequel publie la Gazette nucléaire

[2] Entretien réalisé le 18 janvier 1995 avec M. Abraham Behar, biologiste, maître de conférences de biophysique et médecin des Hôpitaux de Paris, président des Médecins français pour la prévention de la guerre nucléaire, filiale de l’International Physicians to Prevent Nuclear War, qui reçut le prix Nobel de la paix en 1985

[3] Cf. Friendly Fire (voir note 8 de l’article

 

 

 

Retour à la page « Presse : Iraq »

 

Retour à la page « Presse »

 

Retour à la page d’accueil

 

pour tout contact :

roland.laffitte@wanadoo.fr